Excellence Monsieur Kaire Mbuende, Ambassadeur de la République de Namibie, et Président du Comité des Ambassadeurs du Groupe des Etats ACP ;
• Excellence Dr Patrick Gomes, Secrétaire Général du Groupe des Etats ACP ;
• Excellences Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et Représentants des Missions diplomatiques ;
• Chers compatriotes et amis du Rwanda
• Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi de commencer, en remerciant le Secrétaire Général du Groupe des Etats ACP
ainsi que l’ensemble de son l’équipe pour l’organisation de cette cérémonie de la 25ème commémoration des victimes du génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda en 1994. Le thème de cette 25ème commémoration est : “Mémoire, Unité , Renouveau”.
Je vous remercie cher(e)s collègues pour votre présence en nombre. Votre présence constitue un geste de soutien et de réconfort que nous apprécions. Cela fait 15 ans, que vous vous joignez aux peuples rwandais pour commémorer les nôtres, et nous vous en sommes reconnaissants.
Mesdames et messieurs,
Le 7 avril 1994, le Rwanda a atteint le sommet de l’horreur. Nous ne considérons pas cette date comme le moment d’un basculement, d’une réaction spontanée ou encore incontrôlée comme les malintentionnés le disent. Le dire, le supposer ou encore l’évoquer s’apparenterait à le nier. Ce crime de génocide a été soigneusement préparé et prémédité pendant plus de 40 ans.
C’est vrai que le génocide avait pour cible les Tutsi, cependant, il nous concerne tous car le crime de génocide est un crime contre l’humanité. Nous nous devons donc de soutenir celles et ceux qui ont survécu, nous nous devons de combattre celles et ceux qui le nie, et nous nous devons de rappeler inlassablement à la génération actuelle et celles qui suivront, les sommets d’horreurs atteints il y a 25 ans.
A dater du 7 avril 1994, le Rwanda a une génération de jeunes gens qui n’a pas connu le génocide, mais qui vit les conséquences de ce dernier. Il appartient aux anciennes générations de transmettre la mémoire, et à cette nouvelle génération de prêter l’attention et
écoute afin que l’oubli et l’ignorance ne nous fassent pas reculer alors que le « plus jamais ça » doit impérativement devenir une réalité.
Mesdames et messieurs,
Nous avons eu une histoire sombre mais nous avons fait le choix de l’unité et de croire en une renaissance. Ces choix n’ont pu se faire sans que l’on se souvienne.
Ces commémorations annuelles ont pour but premier le devoir de mémoire. Ce devoir est pour nous, les Rwandais, la condition sine qua non à la reconstruction de notre pays. Cette responsabilité inhérente à notre humanité et d’autant plus sacrée que son expression proactive sera la meilleure arme contre le négationnisme.
Souvenons-nous de ce million de personne fauché par la barbarie.
Souvenons-nous de celles et ceux qui se sont opposés à cette entreprise funeste au péril de leurs vies. Parmi eux, des casques bleus provenant de certains pays de notre organisation, dont le plus connu d’entre eux est le Capitaine Mbaye Diagne d’origine sénégalaise. Nous tenons à saluer ici sa bravoure.
Souvenons-nous de celles et ceux qui ont survécu : rescapés ou justes, qui sont la preuve vivante que cette horreur a bien été réelle, tangible, brutale et meurtrière. Je salue, leur courage et leur ténacité, eux qui continuent à témoigner contre vents et marrés.
Enfin, rendons hommage, à toutes ces personnes qui ont fait leur ce combat pour la vérité. Anciens soldats, chercheurs, société civile ou journalistes, qui depuis le premier jour n’ont eu de cesse de dire au monde ce que les Tutsi du Rwanda subissaient. Nous ne les oublions pas.
Mesdames et messieurs, chers amis
Au-delà du souvenir, un autre gage de l’unité est la justice. Si le Rwanda a su puiser dans sa culture pour juger près de deux millions de personnes qui avaient commis le crime de génocide, la situation dans le reste du monde est pour le moins mitigée.
A compter du 4 avril 2018, (980) Neuf cent quatre-vingts cas d’individus vivant dans 33 pays du monde ont fait l’objet de mises en accusation et de mandats d’arrêt internationaux. Ces suspects du génocide bénéficient actuellement d’une protection juridique sur tous les continents, principalement en Afrique (où 805 individus vivent dans 18 pays africains). Ces suspects se trouvent également en Europe dans les Amériques, en Nouvelle-Zélande et en Australie.
Le gouvernement rwandais demande aux pays qui hébergent ces individus les deux choses suivantes :
Premièrement, adopter des lois punissant les crimes contre l’humanité afin de garantir que les Rwandais soupçonnés d’avoir commis le crime de génocide soient traduits en justice.
Deuxièmement, répondre aux mandats d’arrêts internationaux soit en jugeant ces personnes devant la justice des pays concernés, soit en extradant ces individus vers le Rwanda comme certains pays l’ont déjà fait. Je citerais la Hollande, le Canada, les USA, la Suède et la Norvège. Notre pays a démontré à plusieurs reprises sa capacité de rendre la justice dans la transparence et la responsabilité suivant les standards internationaux.
Vous vous conviendrez avec moi que la lutte contre l’impunité demande une grande collaboration à l’échelle internationale.
Mesdames et messieurs, Excellences,
Nous avons pu compter sur votre soutien pour l’adoption de l’appellation appropriée du génocide perpétré contre les Tutsi.
Curieusement, certains persistent dans le choix d’une appellation vague pour confondre victimes et bourreaux. Il s’agit ni plus ni moins de manoeuvres négationnistes et révisionnistes qui vont à l’encontre de la résolution N°72/550 Adopté par L’Assemblée Générale des Nations Unies le 26 janvier 2018.
Le gouvernement rwandais appelle ses partenaires internationaux à la vigilance face aux formes que prenne ce négationnisme. Il ne s’agit plus de le nier mais de questionner les causes, le degré de son atrocité ou encore légitimer son déclenchement. Ces méthodes sont clairement identifiées parce qu’elles ont servi à la négation de la shoah.
Au-delà de la vigilance, nous invitions tous les pays du monde de se joindre à nous dans cette lutte contre le négationnisme du génocide perpétré contre les Tutsi en légiférant ce crime, car c’est la seule façon d’endiguer l’idéologie génocidaire .
Mesdames et messieurs,
Aujourd’hui nous pouvons affirmer que l’ensemble du peuple rwandais est debout et digne. Les blessures de l’histoire n’ont pas eu raison sur notre résilience. Au contraire, elles ont été le terreau d’une société déterminée à réussir ; d’une population convaincue que l’union fait la force ; et d’une jeunesse ambitieuse et assoiffée de prospérité.
Fort de cette expérience, le Rwanda oeuvre pour le consensus, l’unité et le multilatéralisme à l’échelle internationale.
C’est ce message d’espoir que nous voulons porter au monde aujourd’hui.
Il fallait une force motrice et un courage collectif hors du commun pour réussir à recréer une société aussi vive et proactive qu’est le Rwanda d’aujourd’hui.
Avec patience et intelligence, mon pays, le Rwanda, est revenu dignement dans le concert des nations et nous en sommes fiers.
Tout comme nous nourrissons gratitude et bienveillance envers vous. De grandes avancées restent à tracer ensemble , mais pour l’heure, je vous invite au recueillement.
Aujourd’hui n’est que le début des 100 jours pendant lesquels le génocide a eu lieu. Ne vaquons pas à nos activités pendant les trois prochains mois sans avoir une pensée pour les victimes du dernier génocide du 20ème siècle.
Je vous remercie pour votre attention.