Les ministres ACP du commerce, réunis à Bruxelles du 24 au 26 juin 2015 ;

AYANT EXAMINÉ l’état d’avancement des processus de négociation et de mise en œuvre des APE dans les différentes configurations ACP ;

NOTANT que la signature de l'Accord UE-Afrique de l'Ouest est en bonne voie, et que seuls deux pays de la CEDEAO plus la Mauritanie ne l'ont pas encore signé, tandis que côté européen, les 28 Etats membres ont signé l’Accord ;

CONSTATANT que le toilettage juridique progresse dans les régions de la Communauté de l'Afrique de l'Est et de l'APE SADC; notant toutefois que, s'agissant de la deuxième région, des préoccupations subsistent dans des domaines tels que le commerce des armes, l’alignement du nouvel APE sur l'ACDC, et les dispositions relatives à l'entrée en vigueur;

NOTANT que la mise en œuvre d'un APE complet dans la région CARIFORUM suit également son cours, certaines questions épineuses étant traitées dans le cadre des comités conjoints sur l'APE, notamment les défis majeurs liés à la mise en œuvre relevés par l'étude de suivi commandée par l'UE et celle menée par la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), tandis que les avantages concrets de l'APE restent encore à venir ;

PROFONDÉMENT PRÉOCCUPÉS par les décisions unilatérales de l’UE, notamment la publication, le 17 juin 2015, de sa liste des prétendus paradis fiscaux internationaux sur la base de procédures opaques et subjectives, qui remettent en cause les avantages liés à l’APE régional, notamment dans le secteur des services dont la majorité des pays des Caraïbes et d’autres Etats insulaires et petites économies ACP sont tributaires ;

CONSTATANT AVEC INQUIÉTUDE que la région Pacifique n'a pas eu de rencontres formelles au niveau politique avec l'Union européenne depuis 2007 ;

NOTANT que la Commission européenne a proposé à la région Pacifique de réformer ses systèmes de gestion de la pêche, comme condition préalable à la conclusion des négociations sur un APE complet ACPPacifique-UE ;

EncouragÉS par le fait qu’une réunion du Groupe de Contact a eu lieu entre l’Afrique Centrale et l’Union Européenne le 19 Juin 2015, après pratiquement quatre années sans aucune rencontre entre les deux parties;

SE FÉLICITANT de ce que, dans la région AfOA, des progrès importants ont été notés dans les quatre pays qui mettent en œuvre un APE intérimaire, et des réunions conjointes ont régulièrement été tenues ;

Égalément encouragÉs par la décision de la région AfOA de poursuivre les négociations en vue d’un APE complet, sur la base de l’APE intérimaire sur la base du texte conjoint approuvé et amélioré;

DÉPLORANT toutefois le rejet par l’UE de la demande introduite par la région concernant la poursuite des négociations sur un APE complet, manifestement en raison de l’absence d’offres adéquates concernant l’accès au marché de la part des 11 pays de la région AfOA-APE;

NOTANT que, dans les régions qui n’ont pas achevé les négociations, les domaines de divergence sont plus ou moins identiques et portent notamment sur les dispositions relatives au développement, les offres d’accès au marché, les périodes transitoires, et la clause de non-exécution; notant également qu’au chapitre de la mise en œuvre, des progrès ont été accomplis dans certains domaines, tandis que des défis subsistent dans d’autres;

Déclarent ce qui suit:

1. L’UE devrait engager les discussions avec les différentes régions ACP sur la base du principe fondamental selon lequel les APE sont avant tout de véritables instruments du développement, et pas seulement des accords sur la libéralisation des échanges;

2. Pour que les APE soient des instruments de développement, de promotion d’une insertion harmonieuse et progressive des Etats ACP dans l’économie mondiale et de renforcement de leurs capacités d’exportation, ils doivent incorporer des dispositions visant à aider les Etats ACP à améliorer leur compétitivité, à surmonter les contraintes liées à l'offre et aux infrastructures commerciales ;

3. La réalisation des objectifs de développement requiert la mise à disposition de ressources suffisantes et appropriées; à cet égard, l’UE devrait travailler avec les Etats ACP à identifier des sources de financement et des mécanismes nouveaux à même de compléter et amplifier les effets des ressources déjà identifiées pour assurer le financement des activités nécessaires à la transformation structurelle des économies des Etats signataires des APE; un tel appui doit être global et tenir compte de la portée et du niveau de libéralisation, ainsi que du niveau des engagements souscrits dans le cadre des APE ;

4. La négociation et la mise en œuvre des APE devraient se fonder sur des principes qui tiennent compte du concept de géométrie variable, de l'accent àmettre sur la dimension, du traitement spécial et différencié et de la reconnaissance des défis spécifiques auxquels les pays ACP doivent faire face ;

5. L’expérience du CARIFORUM en matière de mise en œuvre offre des enseignements utiles à d’autres régions qui viennent de conclure un Accord, ainsi qu’à celles qui poursuivent les négociations ;

6. Il est nécessaire d’entreprendre des réformes, y compris au niveau fiscal, de nature à permettre aux économies ACP concernées de tirer parti de la mise en œuvre des APE ;

7. La conclusion, au sein de différentes organisations d’Afrique, d'APE distincts non conformes aux dispositions existantes en matière d'intégration régionale et comportant divers engagements de réduction tarifaire applicables aussi bien aux produits qu’aux calendriers, ainsi que des listes d'exclusion, règles d'origine et dispositions juridiques différentes, est de nature à compliquer les processus de formulation d’une position politique commune dans le cadre de la mise en œuvre du programme d'intégration. Par conséquent, les États et régions ACP doivent établir un mécanisme permettant de surmonter tout obstacle à la mise en œuvre de leur programme d'intégration régionale découlant des engagements souscrits dans le cadre des APE ;

8. La mise en œuvre de l'Accord sur la zone de libre échange COMESA-CAE-SADC annoncé lors du Sommet tripartite tenu le 10 juin 2015 à Sharm El Sheikh (Egypte), ainsi que les négociations sur la zone de libre-échange à l'échelle du continent africain lancées par l'Union Africaine le 15 juin 2015 à Johannesburg (Afrique du Sud), constituent des faits positifs qui contribueront à l’élaboration d’un cadre commercial tous-ACP et qui devaient être appuyés et non entravés par le processus des APE;

9. La proposition de l'UE visant à faire en sorte que la signature, la ratification et la mise en œuvre des accords conclus l'année dernière soient achevées d'ici octobre 2016 doit tenir compte de l'impact potentiel d’une telle échéance sur l’objectif commun des ACP et de l’UE de renforcement de l'intégration régionale; à cet égard, l’UE devrait éviter de fixer unilatéralement des échéances, car de telles actions tendent à être contreproductives et à créer des frictions au sein du partenariat avec les États ACP ;

10. Il est indiqué que la Commission européenne organise des réunions avec les régions qui n'ont pas encore conclu un APE complet, ainsi qu’une réunion ministérielle conjointe Pacifique-Commission européenne, en ce qui concerne la région Pacifique, afin de régler les dernières questions litigieuses et d'œuvrer, de façon constructive et dans un véritable esprit de bonne volonté et de partenariat, à la conclusion d’un APE complet favorable au développement d'ici au 31 décembre 2015 ;

11. L’UE devrait retirer immédiatement sa liste noire et s’abstenir de diffuser ce genre de documents en dehors de la procédure convenue au niveau international ;

12. L’UE est invitée à faire preuve de la même flexibilité que les configurations régionales ACP pour les APE, en vue de la conclusion et de la mise en œuvre d'accords inclusifs, couvrant l'ensemble des membres des organisations régionales ACP ; et

13. Le principe de la "capacité de mise en œuvre" doit être appliqué dans le cadre de la mise en œuvre des APE, et il serait utile que cette question soit examinée de manière approfondie à l'occasion des réunions des comités conjoints sur les APE.

Bruxelles, le 26 juin 2015